En 2018 : l’ode à la perfection de Luka « Maestro » Modrić et de la Croatie

Lors du mondial en Russie, la sélection croate a réalisé une prestation dantesque. Indispensable dans la transmission, intelligent dans la conservation et remuant balle au pied, Luka Modrić a montré à la planète foot de quoi il était capable.

Modric

Durant la Coupe du monde 2018, une douce musique s’entendait en plus d’une centaine de langues. Partout sur le globe, les observateurs louaient la prestation d’un Luka Modrić drapé du damier rouge et blanc. Au sein du pays qui a connu Igor Stravinsky et Piotr Tchaïkovski, la terre slave a peut-être accueilli la meilleure composition d’un chef d’orchestre depuis bien longtemps. Mais même s’il menait ses coéquipiers à la baguette, c’est bien avec le ballon rond au bout du pied que Luka Modrić a épaté son monde.

Modrić, la surprise attendue ?

Auteur de prestations toujours aussi convaincantes avec le Real Madrid, le meneur de jeu croate était l’un des cadors prévus pour le mondial russe de 2018. Cependant, il serait réinventé l’histoire que de dire que la planète foot s’attendait à une terre réussite du joueur. Baignée dans un milieu d’exception composé de Kroos et Casemiro, la magie du joueur devient aussi évidente que banale. Auréolées de trois titres consécutifs en Ligue des champions, les auras madridistas restent néanmoins bridées derrière celle de Cristiano Ronaldo.

Même avec des saisons folles, comment s’extirper du modèle devenu norme. Ce dernier met les attaquants au centre de toutes les attentions. Dominée par CR7 et Leo Messi, la masse populaire n’a que peu d’intérêts pour d’autres stars du ballon rond. Avec cette dynamique, l’incroyable devient banal. En juin 2018, le journal Le Monde avait réalisé un sondage pour chaque pays disputant la Coupe du monde. Quelques jours avant le tournoi, 99,5 % des lecteurs voyaient la Croatie être éliminée avant la finale. Par ailleurs, un questionné sur deux ne voyait même pas cette sélection dépasser les groupes. Dans une compétition où l’engouement populaire est l’une des principales signatures, le parcours d’un finaliste si inattendu prend des airs de formule magique.

Un fantastique exploit pour une incroyable épopée

Pour donner un coup de pied dans la fourmilière, quoi de mieux qu’une Coupe du monde. Durant un mois, des sélections du monde entier se battent pour le titre suprême. Ce dernier, porté par la ferveur et les générations, permet de faire table rase sur les échelles de puissances instaurées par des clubs surpuissants, par leur pouvoir financier et/ou l’image qu’ils incarnent. Avec un beau groupe croate, Luka Modrić et les siens sont comme tous les autres : une équipe sur les 32 qui, sur un match, peuvent tout renverser.

Ce fameux match, il se fera face à l’un des rivaux naturels de n’importe quel Madridista : Lionel Messi, dieu vivant de l’Argentine et du FC Barcelone. Après une victoire très solide contre le Nigéria 2 à 0, Modrić et les siens vont étriller le pays d’Amérique du Sud. La victoire est nette, sans bavure ni contestation. À la 80e minute, le milieu croate va crucifier l’Albiceleste. Déjà dominé d’un point, tout reste possible. Mais en fixant Otamendi et en décalant subitement à droite, Lukita a mis fin à leurs espoirs. D’une frappe merveilleuse de l’extérieur de la surface, il délivre son équipe. Le gardien argentin, Willy Caballero, ne pourra rien faire. Avec le ballon masqué par Mandžukić et Tagliafico, ce but fait office de coup de pétard imparable.

Coïncidence, le lendemain (22 juin) était un jour férié au pays. Sans nul doute, les rues de Zagreb et d’autres grandes villes ont dû être teintées de sourires jusqu’à très tard dans la nuit. Avec ce succès assuré par le joueur du Real Madrid, la Croatie voit la première place du groupe D lui tendre les bras. Avec elle, la certitude d’avoir une partie de tableau bien plus clémente se dessine.

Une phase finale teintée d’effort et de larmes

Le 01 juillet 2018, la Coupe du monde de Luka Modrić paraît déjà être une réussite. Le principal intéressé dresse ne serait-ce que l’accession au 8ᵉ de finale face au Danemark comme une franche réussite. En Zone Mixte, le principal intéressé confirme déjà cette impression en déclarant :

« Nous avons atteint le premier objectif, le plus important. Nous en sommes très heureux. Il faut aller un match à la fois, il ne faut pas céder à l’euphorie. Mais la victoire face à l’Argentine va nous donner une grande confiance pour les prochains matchs. On attend beaucoup de cette équipe nationale, à juste titre, mais aussi difficile que ce soit, il faut rester les deux pieds sur terre et se préparer à ce qui nous attend. Je crois que nous pouvons faire encore plus, mais restons concentrés. L’important, c’est qu’on soit passé. »

Après des phases à élimination directe, déjà synonyme de campagne réussie, les esprits sont libérés. La pression, elle, semble se dissiper. Cependant, il y a bien un sentiment qui transpire de cette équipe, c’est la rage de vaincre. Face au Danemark, à la Russie et à l’Angleterre, la Croatie ira toujours aux prolongations. Infatigable, Luka Modrić est le joueur qui parcourt le plus de kilomètres sur toute la compétition. Avec 63 unités parcourues, la compétition du joueur se revêt d’un sentiment irréel, alors que ce dernier approche les 33 ans.

Malgré les quelques échecs, un penalty manqué à la 116ᵉ en 8ᵉ notamment, la flamme croate ne s’éteindra pas. Allant jusqu’en finale, ces derniers échouent aux portes du bonheur. Comme lot de consolation, le milieu madridista repartira avec le trophée de Meilleur joueur du mondial. Quelques mois après, il glanera un Ballon d’Or qui met fin à l’hégémonie du duo Cristiano Ronaldo – Lionel Messi. De l’ombre à la lumière, ce tournoi 2018 n’a pas révélé Luka Modrić. Non, mais ce dernier aura changé à jamais le souvenir que le monde retiendra d’un Maestro indémodable.

 

Erwan Harzic