Dans le néant face au Barça

Dimanche 20 mars, les joueurs de Carlo Ancelotti n’ont pas su tenir leur statut. Ils ont sombré dans un Clásico plus qu’ouvert en proposant un jeu vide dans l'initiative et la tactique.

Leader, certes. Mais à quoi bon ? Ce lundi 21 mars, les Madridistas des quatre coins du monde ont eu un réveil difficile. Il faut dire que la soirée de la veille a pris des airs de coups de massue. Avec une défaite 0 à 4 sur la pelouse du Bernabéu, Carvajal et ses coéquipiers ont été humiliés par le FC Barcelone. À domicile, le Real Madrid concède ce qui est, de loin, la plus grosse défaite de la saison. Une pilule qui a beaucoup de mal à passer. Capitaine du jour, Nacho s’est exprimé à la télévision espagnole après le match. Comme le veut la coutume, il a donné ses impressions sur ce dernier : « C’était l’un de nos pires matchs de la saison. Peut-être sommes-nous arrivé détendus sur le terrain, avec cet avantage au classement. Ce n’était pas un match où on devait commencer comme ça, bien au contraire. » 

L’honneur après le classement

Derrière cet aveu d’échec, l’Espagnol a également eu un commentaire plus critiquable. S’il avoue « qu’il est triste, car cela fait toujours mal de perdre un Clásico », il enchaîne en déclarant : « C’est compliqué certes, mais nous sommes toujours leaders. » Dans la même lignée, Carlo Ancelotti a déclaré « Nous sommes désolés, mais il ne faut pas en faire un drame. » À en écouter les principaux acteurs du maillot blanc, la défaite n’est pas si grave. Certes, le Real Madrid est largement leader de LaLiga. Mais où est passé l’honneur des joueurs ? Les rois, se sont-ils transformés en comptable à agiter le drapeau du classement comme excuse. Ressasser le passé ne sert à rien, mais qu’aurait dit Sergio Ramos, Iker Casillas ou Raúl ? Se seraient-ils consolés de cela au coup de sifflet final ? Le doute est (plus que) possible.

De la même manière, parlons des acteurs de la veille. À plusieurs reprises, on a vu Luka Modrić, Éder Militão et Fede Valverde s’énerver face à leurs coéquipiers. Évidemment, ces derniers ne sont pas exempts de tout reproche. Mais ces trois joueurs-là ont au moins eu le mérite de montrer du caractère. Une qualité qui a été rare du côté des hommes d’Ancelotti. De nombreuses erreurs techniques ont aussi été visibles. À plusieurs reprises, les défenseurs de la capitale ont offert des caviars à leurs adversaires. Les deux latéraux ont été constamment en retard sur les retours défensifs. Offensivement, il aura fallu attendre l’entrée des remplaçants et le placement de David Alaba sur le flanc gauche pour apercevoir les premières lueurs d’un jeu construit. Les quelques précédents ballons envoyés aux Brésiliens par-dessus les lignes n’ont pas suffi à peser dans la balance. Quant au positionnement du numéro 10 croate en tant que faux 9, l’opération a très vite été sabordée par le manque de pressing du côté gauche. Ousmane Dembélé en a d’ailleurs profité pour s’échauffer les mollets en prévention de sa prochaine blessure.

Les ficelles du métier

Au Bernabéu, le naufrage a été collectif. Plus que cela, il a été total. Après le match, Don Carlo s’excusait en avouant : « Nous n’avons pas été reconnaissables, tout a mal tourné. J’ai dit aux joueurs que c’était de ma faute. » Finis les violons, le gong a sonné. Car entendre un multiple gagnant de la Ligue des Champions en tant qu’entraîneur dire ce genre de banalités revient à verser un verre d’eau dans l’océan. L’Italien connaît bien son métier, il connaît ces douloureux résultats. Mais peut-on permettre à un entraîneur du Real Madrid de baisser la tête ? Le menton d’un Madridista ne doit-il pas être toujours fièrement levé ? L’ADN des Rois d’Europe refuse de consentir à la défaite face à l’éternel rival. L’accepter est obligatoire, le score est fait, mais tout mettre sous le tapis revient à penser que perdre dans ces conditions devient acceptable. Or, jamais cela ne doit le devenir. En conférence de presse, il complète : « Je ne pense pas que cela affecte notre humeur. J’ai échoué dans mon approche. Cela peut arriver une fois ou deux, mais je ne me trompe généralement pas. » 

Dans cette « non-généralité », Carlo Ancelotti a montré au monde entier son incapacité à gérer la rotation d’un groupe. En continuant de titulariser Nacho à gauche, l’Italien a mis le numéro 6 en difficulté. L’Espagnol était incapable de se tenir à la vitesse de ses adversaires. Avec un milieu offensif en faux 9, le message envoyé aux joueurs derrière Karim Benzema semble désastreux. Acheté pour une somme cumulée de 180 millions €, les fantômes de Luka Jović et, surtout, d’Eden Hazard paraissent définitivement ne plus être dans les plans du coach. Si l’intérêt d’un Luka Modrić aussi haut avait pour but d’aider l’attaque à décrocher, pourquoi ne pas avoir fait entrer le Belge ? Durant sa carrière, il a régulièrement montré de grandes qualités en ce qui concerne sa capacité à faire monter son bloc offensif. À Madrid, c’est même l’une des rares choses qu’il a su montrer durant ses apparitions. À force de faire du bricolage, l’étagère a cédé et après la trêve internationale, on regardera sous les planches pour voir combien d’assiettes se sont brisées.

Erwan Harzic