Ruud van Nistelrooy : l’apogée d’une espèce éteinte

Il y a quelques jours, Ruud van Nistelrooy a confié que son plus grand regret était d'avoir quitté le Real Madrid. Avec les arrivées conjuguées de Benzema, Cristiano Ronaldo et Kaká, il redoutait de ne pas participer à la Coupe du monde 2010. Il a donc pris la direction d'Hambourg mais reconnaît désormais qu'il avait pris sa décision trop précipitamment.

Ruud van Nistelrooy

En effet, même si l’effectif de la ligne d’attaque était pléthorique, Benzema a connu des débuts très compliqués au Real Madrid et Higuain, même s’il avait progressé par rapport à ses débuts, restait derrière, dans la hiérarchie des attaquants. Retour sur le passage au Real de l’un des plus grands avant-centres de l’histoire du football : Ruud van Nistelrooy.

Gerd Müller, Marco Van Basten, Jean-Pierre Papin, Georges Weah, Hugo Sanchez, Alan Shearer, Romario, Gabriel Batistuta, Fabrizio Ravanelli, Ronaldo Nazario, Christian Vieri, Davor Suker, Andryie Shevchenko, Filippo Inzaghi, David Trezeguet, Zlatan Ibrahimovic, Samuel Eto’o Didier Drogba ou encore Luis Suarez. Cette liste non-exhaustive d’avant-centre qui a marqué l’histoire du football démontre une chose : avant les années 2010, les numéros 9 prolifiques n’étaient pas une denrée rare.

Les relations entre les directions madrilènes et bavaroises se sont dégradées suite au refus catégorique de cette dernière de vendre Robert Lewandowski après que l’attaque madrilène ait été bien moins performante dès le départ de Cristiano Ronaldo. Même si l’intransigeance de Karl-Heinz Rummenigge et ses acolytes a fait grincer des dents, leur justification à celle-ci n’est pas dénuée de pertinence, tant s’en faut. En effet, les anciens joueurs du Bayern Munich, reconvertis en dirigeants du club phare de Bavière ont mis en exergue le fait que de nos jours, retrouver un joueur au profil similaire à celui du polonais serait une tâche très ardue.

Un passage de témoin symptomatique

Dès le début de son deuxième mandat, Florentino Pérez avait frappé fort en recrutant Cristiano Ronaldo et Karim Benzema. Les deux joueurs, bien qu’encore jeunes à l’époque, avaient déjà une bonne expérience du haut niveau et des compétitions européennes. La dernière décennie les aura vus marquer l’histoire du football, le français continuant à le faire.

Toutefois, ce qu’il convient de retenir, c’est la polyvalence des deux hommes et leurs aptitudes à tout faire. Cristiano Ronaldo a débuté en tant qu’ailier droit et jouait clairement comme attaquant de pointe lorsque Zidane alignait son milieu de terrain en losange. Quant à Benzema, sa légendaire action au Vicente Calderon est l’exemple le plus probant de sa faculté d’adaptation. Peu d’ailiers gauches auraient fait mieux que lui à ce moment-là. José Mourinho l’avait même aligné titulaire au poste d’ailier droit lors d’un match de Liga.

En 2009, les deux meilleurs buteurs de l’histoire du Real Madrid ont repris le flambeau d’un attaquant au profil différent d’eux. Il n’avait pas la vitesse de cours du portugais ni la précision des passes de l’ancien lyonnais. Cependant, il possédait d’autres qualités : la précision de frappe, la justesse de placement, l’incessante disponibilité, la maîtrise du fameux espace-temps cher à Xavi ainsi que la capacité à se défaire de son défenseur. Grâce à celles-ci, Ruud van Nistelrooy laissera à jamais un souvenir impérissable dans les cœurs et mémoires des supporters madrilènes.

Ils se souviendront que l’avant-centre batave a tenu l’attaque madrilène presque à lui seul et que la blessure qui l’a laissé éloigné des terrains de novembre 2008 à l’été 2009 a été rédhibitoire au Real Madrid et à ses entraîneurs Bernd Schuster et Juande Ramos.

Un départ de Manchester pour une raison identique à celle de Beckham

Au cours de la saison 2005-2006, Van Nistelrooy, alors joueur de Manchester United, est en froid avec Sir Alex Ferguson. Lors de la finale de la Coupe de la Ligue contre Wigan Athletic, il est laissé sur le banc toute la rencontre au profit de Louis Saha. Durant la Coupe du monde, il n’a guère souhaité s’attarder sur cet événement faisant référence à une « divergence d’opinions » entre lui et Ferguson. Après la Coupe du monde, Ferguson a fait savoir à Van Nistelrooy était libre de partir. Dès les semaines suivantes, des rumeurs circulaient sur l’intérêt du Real Madrid et du Bayern Munich.

Le vendredi 28 juillet, le Real Madrid annonce sur son site officiel qu’il s’est attaché les services du Néerlandais pour la somme de 15 millions d’euros. Il débarque donc pour renforcer une ligne d’attaque composée alors de Ronaldo Nazario, Robinho et Raúl.

Une première saison exceptionnelle

Lors de la saison 2006-2007, sa première avec le club merengue, il ne tarde pas à ouvrir son compteur personnel. Dès son deuxième match, il inscrit un triplé contre Levante, et le 12 novembre 2006, il marque quatre buts contre Osasuna. De plus, il est l’un des grands artisans du titre de LaLiga 2006-2007, terminant meilleur buteur du championnat avec 25 buts, et remportant le trophée Pichichi, décerné par le journal espagnol MARCA au meilleur buteur de la saison. En raison de son importante contribution à l’obtention de ce titre, il figure dans la liste des meilleurs joueurs du monde établie par la FIFA, en 17e position.

Dès son premier Clásico, il marque au Bernabeu contre le FC Barcelone de Frank Rijkaard au terme d’une merveilleuse contre-attaque menée avec Guti et Robinho. Lors du match retour, son ouverture du score et son pénalty réalisé n’ont pu empêcher Messi d’inscrire son premier triplé avec le FC Barcelone. Fait insolite : à chacun de ses pénaltys, il plaçait le ballon en retrait sur le point de pénalty.

La saison suivante (2007-2008) il manque une partie du championnat en raison d’une opération de la cheville en mars 2008. Son retour lors du Clásico contre Barcelone le 7 mai 2008 ne pouvait pas être plus réussi. Il n’a fallu que deux minutes à l’avant-centre néerlandais pour marquer sur penalty. Gêné par des blessures à répétition, il n’est pas parvenu à remporter le titre de meilleur buteur de la Liga 2007-2008. Durant cette saison, Van Nistelrooy a inscrit 20 buts (16 en Liga) en 32 matches et a vu son contrat avec le Real renouvelé jusqu’en 2010.

Une absence fatale à son équipe

Bien que la saison 2008-2009 ait bien démarré pour le Néerlandais avec un but d’anthologie inscrit au Vicente Calderon, elle s’est rapidement terminée. En novembre 2008, le Real Madrid annonce que Van Nistelrooy manquerait le reste de la saison après qu’une arthroscopie ait détecté une lésion du ménisque dans son genou droit. Le spécialiste Richard Steadman, qui avait déjà opéré le genou de Van Nistelrooy en 2000, lors d’une autre blessure grave survenue un jour seulement après sa signature à Manchester United, prévoyait une convalescence de six à neuf mois.

En raison de cette blessure, Van Nistelrooy a terminé la saison avec le maigre bilan de dix buts en dix apparitions pour les Merengues. Afin de compenser son absence, Pedja Mijatovic, directeur sportif de l’époque avait recruté un joueur similaire, tant par le poste, la nationalité que le profil. Hélas, le jeune Jan-Klaas Huntelaar, transfuge de l’Ajax Amsterdam à l’intersaison, n’est jamais parvenu à être autant efficient que son compatriote.

Des blessures récurrentes et moins protagoniste

Lors de la pré-saison 2009-2010, il a fait son retour sur le terrain après presque un an d’absence pour cause de blessure, jouant les quinze dernières minutes du match amical contre Rosenborg, en remplacement de Kaká. Il remplace Cristiano Ronaldo à la 34e minute et marque l’un des buts du Real Madrid lors de la victoire 5-0 contre Xerez le 20 septembre 2009, mais le lendemain de son retour officiel sur le terrain, Van Nistelrooy se blesse à nouveau, cette fois au muscle droit antérieur de la cuisse gauche, ce qui lui vaut une indisponibilité de 5 semaines.

Le 27 octobre, plus d’un mois après sa blessure, il fait son deuxième retour de la saison en entrant à la 71e minute à la place de Raul Gonzalez lors du match de Copa del Rey contre Alcorcón. Le modeste club de la ville d’Alcorcón allait surprendre l’Espagne toute entière en éliminant le Real Madrid de la compétition, en s’imposant 4-0 dans son stade Municipal de Santo Domingo, puis en étant battu au match retour 1-0 au Santiago Bernabeu.

Finalement, il convient de souligner que Ruud a été le coéquipier pendant 6 mois de Ronaldo Nazario, le meilleur joueur avec lequel il estime avoir joué. Il a également égalé le record de rencontres à la suite dans lesquelles il a inscrit un but. Jusque-là, ce dernier était détenu par Hugo Sanchez.

Par ailleurs, dès sa première saison, les lecteurs du journal AS l’ont désigné meilleur joueur de la saison, meilleur recrutement, meilleur attaquant et auteur du plus beau but de l’année (inscrit contre Valence). Il termine aussi deuxième meilleur buteur européen derrière Francesco Totti (25 buts pour Ruud contre 26 pour Totti). Il termine à nouveau 6e au classement du Ballon d’or. Van Nistelrooy a fait ses adieux au public du Santiago Bernabeu sous ses ovations.

Lors de son retour à Madrid en 2012 sous les couleurs de Malaga, les supporters madrilènes lui ont démontré qu’ils ne l’oublieront pas de sitôt et qu’ils lui étaient reconnaissants d’avoir déclaré qu’il ne célébrerait pas un éventuel but. Gageons qu’il en sera de même s’il revient avec le PSV Eindhoven, club qu’il entraîne depuis l’été dernier.

 

Gjon Haskaj