Rodrygo Goes, la prolongation qui vaut caution

par | 09/11/2023 - 13:11 | 0 commentaires

Le Brésilien, dont le bail a récemment été étendu jusqu’en 2028, est tenu en haute estime par l’état-major madrilène. Cet adoubement ne saurait exonérer la jeune pépite de tout élan de progression, de la conception des actions à la finalisation. Libéré de ce poids mental, Rodrygo doit directement faire profiter sa vivacité aux performances du club.

30 juin 2028. La nouvelle date d’expiration du contrat de Rodrygo laisse le temps au Brésilien de voir venir la fin de son aventure à Madrid, si tant est qu’il ait des envies d’ailleurs un jour. Mais durant ces quatre ans et demi, l’ailier n’aura absolument pas le loisir de se reposer sur ses lauriers. C’est même tout le contraire : l’absence de concurrence directe à son poste doit lui permettre d’accéder définitivement au statut de titulaire indéboulonnable, parfois récemment remis en cause.

En délicatesse devant la cage depuis le début de saison avec trois réalisations pour treize matches joués, il se sait davantage attendu sur son rendement. Le Brésilien a toutefois été très en vue dans le jeu face à Braga en coupe d’Europe (3-0), avec un but et une passe décisive à la clé. Si Vinicius tend à marier la fulgurance de la vitesse avec l’élégance du dribble, Rodrygo, lui, propose de faire rimer sobriété et efficacité.

De la surprise à l’évidence du phénomène

Ses qualités premières épousent le jeu madridista tout en le bonifiant : rapidité d’exécution, altruisme, remarquable capacité d’adaptation et précision dans l’ultime geste. Les deux dernières devraient être écrites en lettres d’or sur son CV tant elles ont fait de Rodrygo le phare du Real Madrid dans la campagne 2022 de Ligue des champions. Chaque supporter s’en souvient : son doublé lors de la demi-finale retour face à Manchester City demeure hors du temps.

Remplaçant au coup d’envoi, puis présent au bon endroit au bon moment, effectuant sa tête victorieuse sous une pression dantesque, le Brésilien s’est offert ce jour-là l’affection éternelle des suiveurs et l’admiration de ses partenaires. Depuis la surprise du 4 mai 2022, le remplaçant de luxe a pris du galon dans l’effectif, au point de démarrer la quasi-totalité des rencontres. Avec un léger mais durable bémol : ce changement nivelle ses performances.

Rodrygo Goes sous les couleurs du Real Madrid (Icon Sport)

Rodrygo Goes sous les couleurs du Real Madrid (Icon Sport)

Malgré son jeune âge, Rodrygo semble plafonner à mesure que les mois s’enchaînent. Cette insidieuse impression se traduit crûment par un début de saison 2023/2024 raté. En septembre, lorsque la Casa Blanca s’est davantage reposée sur lui du fait de la blessure de son compatriote Vinicius, il n’a guère pu aider ses coéquipiers dans le dernier tiers du terrain. Au lieu de les emmener dans son sillage, le joueur formé à Santos a multiplié les actions brouillonnes.

Comme s’il n’arrivait plus à faire briller le côté droit du Real Madrid. Ce retard à l’allumage ne constitue toutefois pas un péril insurmontable, comme tend à le démontrer sa rencontre réussie au Bernabéu face à Braga en C1.

Il est évident qu’aucun analyste n’imagine aujourd’hui un Real Madrid sans Rodrygo, tant son professionnalisme et son dévouement pour l’institution demeurent intacts. Reconnaître ce passage à vide représente sûrement une étape cruciale pour surmonter l’épreuve de la confirmation. Celle d’un attaquant surdoué appelé à devenir une icône mondiale.

La maturité, principal moteur de sa future ascension

« Nous devons nous montrer patients, les attaquants traversent parfois des moments délicats. Rodrygo est le joueur qui frappe le plus en Liga », a commenté Carlo Ancelotti en conférence de presse en amont de Real Madrid-Braga. Comme pour souligner que la relative mauvaise passe actuelle du Brésilien n’est pas une lubie des journalistes. Sa remarque a valeur de symbole : le joueur, jusque-là encensé pour ses caractéristiques de finisseur clinique, ne compte qu’un seul but en championnat cette saison malgré ses nombreuses tentatives. Cette constatation nécessite-t-elle forcément une mutation de sa part ?

Pour retrouver son meilleur niveau, l’ailier de 22 ans ne doit surtout pas tomber dans le piège du reniement. Rodrygo n’est pas Vinicius et le Real n’aspire pas à posséder un duplicata du magicien de Flamengo. La longévité du premier trouvera son carburant dans la préservation de son authenticité et la gestion de la maturité, vitale au développement de tout footballeur. En d’autres termes, Rodrygo a vocation à rester ce fin buteur capable de tromper le portier adverse quand on s’y attend le moins. Mystifier les défenseurs sur son côté ou distribuer des caviars : tout ceci fait partie de sa panoplie.

Son mental irréprochable devrait lui permettre de progresser suffisamment pour pouvoir changer le cours d’une rencontre à lui seul. Au fond, Rodrygo a les défauts de ses qualités : trop sobre, trop appliqué, trop scolaire. Si l’inattendu arrive à s’immiscer au cœur de son jeu dos au but, rares seront ceux qui critiqueront son actuelle prolongation de contrat. Dans le monde scientifique, l’adage dit que le doute méthodique précède le progrès. Gageons que le ballon rond soit régi par les mêmes règles.

 

Tanguy Soyer

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