Pour les jeunes de La Fábrica, le Real Madrid c’est le club le plus prestigieux, le plus connu, le plus victorieux, en somme : le plus grand club de l’Histoire. Tous rêvaient de jouer dans ce club, aux côtés de leurs idoles et en tant qu’acteurs principaux de leur propre histoire. Et ils en sont tout proches, mais pourtant encore si loin.
De La Fábrica à l’effectif professionnel : une voie sans issue
Les derniers mètres qui mènent à l’équipe première semblent être les plus longs pour les joueurs de l’académie. Cela s’est rapidement constaté avec la blessure de Dani Carvajal. Aucune confiance n’a été affichée concernant les jeunes de la Castilla. Les agents, les parents et même les joueurs eux-mêmes se demandent si une passerelle existe vraiment vers l’effectif de Carlo Ancelotti.
Ce ne sont pas les besoins qui manquent vu les absences qu’il y a eu sur le début de saison. Mais hormis Jacobo Ramón, le défenseur central de 19 ans qui ne se lève jamais du banc, personne n’a eu sa chance. Il a passé un grand total de 0 seconde sur le terrain depuis le début de saison.
Seulement 68 minutes de temps de jeu obtenues avec la Castilla sur un seul match parce qu’il doit faire le nombre avec les A. Quelles sont ses perspectives de progression sans temps de jeu ? Quelle confiance a-t-il vraiment ? Difficile de le dire, mais tous les jeunes de l’académie ne se voient pas faire une saison blanche, même avec les professionnels.
Ce problème est loin d’être nouveau. Nacho était le seul joueur formé à La Fábrica depuis sa plus tendre enfance qui a réussi à s’imposer dans le club merengue. Dani Carvajal, Lucas Vázquez et Fran García ont quant à eux dû partir une ou deux saisons pour prouver au Real Madrid qu’ils avaient les épaules pour prétendre avoir du temps de jeu avec les professionnels.
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Partir de La Fábrica pour prendre son envol
Jouer pour le Real Madrid est un objectif en soi. Cette perspective hypnotise les gens, les rendant incapable de faire le grand saut. Il faut dire que la tâche n’est pas aisée. C’est un pari sportif mais aussi financier. La Maison Blanche investit énormément dans ses équipes de jeunes et les offres salariales sont alléchantes. Pour certains jeunes, leur famille dépend de leurs revenus et risquer de tout perdre n’est pas un choix facile. Un agent contacté par Relevo explique :
“Tu te démarques dans les équipes de jeunes ou dans les équipes de la troisième division et imaginons que le Villarreal B et le Real Madrid te veulent. Villarreal t’offre 70 000 euros par an et plus d’options de progresser jusqu’à l’équipe première… et le Real Madrid te ndonne 150 000 € pour aller au Castilla, même si tu sais que tes chances d’accéder à l’équipe première sont presque inexistantes. La majorité, dans cette situation, choisit le Real Madrid. C’est compréhensible et je le respecte.”
Ce même agent interroge aussi la politique de formation du club. Selon lui, à Chamartín on voit davantage les équipes jeunes comme un investissement financier qui est là pour proposer des dividendes que comme une plus-value sportive. Depuis 2010, plus de 200 millions d’euros ont été obtenus en vendant des jeunes formés à La Fábrica, avec comme point d’orgue les 43 millions d’euros rapportés par la seule vente d’Achraf Hakimi.
Pour s’envoler, il faudrait donc quitter le nid madrilène. C’est le choix qu’Álvaro Carreras a fait en 2020, un latéral gauche très prometteur de l’académie. Parti à Manchester United, il a fait ses gammes avec les équipes jeunes des Red Devils parce que le projet de carrière qui lui a été proposé l’a convaincu. Il a ensuite enchaîné trois prêts en deux ans, jouant presque tous les matchs officiels entre Preston North End (2e division anglaise), le Grenade CF (2e division espagnole) et le SL Benfica (1er division portugaise et Ligue des champions).
Le club lisboète a fini par l’acheter 6 millions d’euros et il est maintenant, à 21 ans, le latéral gauche titulaire d’un club de Ligue des champions, qui a notamment infligé un sévère 4-0 à l’Atlético de Madrid. Son pari était totalement gagnant et il est un des nombreux exemples de départs réussis de La Fábrica.
On peut aussi évoquer le cas de Nico Paz, le meneur de jeu argentin qui éclabousse la Serie A de son talent avec le Como 1907. Il serait d’ailleurs suivi de près par son club formateur, qui dispose d’une clause de rachat et le verrait comme un potentiel lot de consolation si Florian Wirtz ne choisit pas de revêtir la tunique blanche.
La Fábrica, une école de la vie
Si l’ascenseur entre l’académie et l’équipe professionnelle semble en panne, il ne faut pas pour autant penser que rester à La Fábrica est une perte de temps. C’est un endroit où les jeunes grandissent et deviennent plus matures, comme un agent de joueur l’a fait remarquer. “Un de mes joueurs est arrivé là-bas en étant assez sauvage et en est ressorti comme une personne différente. Au Real Madrid, il y a des valeurs et une discipline qui, même si certains l’ignorent, vous éduquent.”
Les infrastructures, l’encadrement, le niveau de compétition, tout y est exceptionnel. Les joueurs progressent et ne perdent pas leur temps. Si les dernières étapes semblent impossibles, certains voient l’académie madrilène comme l’endroit parfait pour prendre de l’élan, avant de faire le grand saut dans des équipes premières plus accessibles. Si le talent est bien là, le Real Madrid pourrait rappeler.
François.
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