Le Real Madrid, une arme géopolitique utilisée à ses dépens par l’Espagne (partie 3) : une puissance économique au service du pays

par | 01/01/2025 - 10:01 | 0 commentaires

Depuis un certain nombre d’années, une même mélodie résonne au cœur de ce monde si atypique, à savoir celui du ballon rond. Un air déplorant la mort d’un football dit « romantique », au profit d’un football dit « business ». La FIFA, dont les décisions se voient guidées par les dollars, des transferts couplés à des salaires toujours plus vertigineux, ainsi que des clubs devenant de véritables marques.

Promouvoir à l’internationale afin de conquérir de nouveaux marchés. Si cette phrase nous évoque presque instinctivement les stratégies marketing employées par différentes firmes, cette dernière correspond aussi à la politique de nombreux clubs sportifs, dont le Real Madrid. De Santiago Bernabéu à Florentino Pérez, le club de la capitale ibérique s’avère même précurseur de ce phénomène, s’identifiant ainsi comme l’une, si ce n’est la plus grande « marque » de son sport.

Et comme pour chaque entreprise d’envergure transnationale, le principal bénéficiaire s’avère l’État. La raison ? En plus de garantir un certain niveau de qualité, ces marques jouent le rôle de premiers ambassadeurs du pays, tant aux yeux des investisseurs que du grand public. Un constat auquel la Casa Blanca n’échappe malgré lui.

Le Real Madrid, une marque mondiale

Fidélité, reconnaissance, qualité, associations et autres actifs. Cette combinaison de cinq mots, en apparence anodine, s’assimile comme les fondements du « modèle Aaker » qui définit les valeurs essentielles d’une marque. Une configuration plus que respectée, permettant au Real Madrid de rentrer dans le cercle restreint des marques d’entreprise globale.

Ce statut quasiment unique dans le monde du sport que possèdent les Merengues, tient, entre autres, de son passé étoilé. En effet, ses cinq premières Coupes d’Europe (1956-1960) ont permis au club de devenir un produit basé sur le bon football, corrélé de victoires sportives. Un statut particulier, dû de même au choix payant de Santiago Bernabéu, ayant grandement participé au fondement de « l’industrie du sport ». De fait, lorsque ce processus, avec les Los Blancos en chef de file, s’est mondialisé ; le club madrilène ainsi que sa marque en ont été les principaux bénéficiaires.

Et si cette dynamique a connu un ralentissement des seventies aux années quatre-vingt-dix, l’arrivée de Florentino Pérez aux aurores du nouveau millénaire a changé la donne. « Reculer pour mieux sauter », le Real Madrid comme illustration de cet adage. Grâce à une stratégie agressive, marquée par le transfert de Luís Figo, mais aussi au façonnement des « Galactiques » (surnom de l’équipe de 2000 à 2006), la marque Maison Blanche a retrouvé sa popularité d’antan.

Une observation parfaitement résumée par un vaste rapport du magazine Dinero publié en septembre 2003 concernant les comptes du « Real Madrid of Spain ». Le club de la capitale se manifeste alors qualifié « d’une entreprise espagnole de projection internationale qui explore de nouveaux marchés et a mis en place un concept de football-spectacle beaucoup plus agressif que ce que l’on connaissait jusqu’à présent ».

Aujourd’hui, ce club détient la valorisation d’entreprise la plus importante du football tant espagnol qu’international (Football Benchmark, 2024) et s’élève à la treizième place du classement mondial tous sports confondus (Forbes, 2022). De surcroît, fin 2016 le club figurait parmi les cinq marques les plus suivies au monde sur les réseaux sociaux (Interbrand, 2017), énième preuve du statut exceptionnel que détient la marque Real Madrid.

Des retombées économiques importantes pour l’Espagne

La France a Louis Vuitton Moët Hennessy (LVMH), l’Italie a Gucci, l’Allemagne a Volkswagen et l’Espagne a… Le Real Madrid. Aujourd’hui, la Casa Blanca s’avère plus, ou à minima autant connu que la ville de Madrid. À titre d’exemple, peu de personnes en dehors du territoire seraient capables de citer le nom du maire de la capitale, contrairement au président Merengues. Ce n’est pas anodin.

À l’image de nombreuses nations ces dernières années, l’Espagne se tourne petit à petit vers une économie basée sur le secteur tertiaire (services marchands/non-marchands), au profit du secondaire (industriel) ainsi que du primaire (agricultures/activités extractives). Un virage qui fonctionne, cette seconde place au classement des destinations touristiques internationales (Statista, 2023), comme illustration de cette observation. De plus, sa capitale Madrid s’est, elle aussi, imposée dans le tourisme culturel, lui permettant ainsi de rivaliser, entre autres, avec les destinations de plage.

Cette popularité grandissante détient tout de même une particularité. Effectivement, l’Espagne mais aussi sa capitale se révèle rarement identifiée dans les films ou encore les publicités de marques locales d’envergure transnationale. Un mauvais penchant qui rend difficile la réalisation des objectifs de réputation, mais aussi d’image d’utilisateur, mais que le sport, et plus particulièrement le Real Madrid, parvient à compenser. D’ailleurs, même si cela parait inopérant, rien que le fait qu’apparaisse le nom de la ville dans le nom du club offre une visibilité importante.

Rien que ce stade, fraîchement rénové et situé au cœur de leurs villes en tant que centre d’expérience de marque, attire de nombreux touristes. Un contexte de pertinence de son patrimoine physique, au sein duquel le musée du club s’avérait en 2017 le troisième musée le plus visité de la capitale, mais aussi et surtout celui qui tire les plus importants bénéfices (MECD, 2018). Ajoutée à cela, l’organisation de méga-événements sportifs, telles les rencontres de Ligue des champions qui améliorent l’image globale de la ville et la nation ibérique détient un net avantage concurrentiel touristique.

En outre, ce lifting améliore non seulement le paysage architectural de Madrid, mais stimule également l’économie locale. Les jours de match, les entreprises voisines, restaurants, bars ou encore magasins réalisent leurs meilleurs chiffres d’affaires, alors que des milliers de fans inondent la région.

Créations d’emplois, investissements directs étrangers (IDE), merchandising… Une liste sans fin, comme preuve du constat suivant : le Real Madrid est le moteur économique, la poule aux œufs d’or de l’Espagne.

Alexis Gallot

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