Alors que l’enceinte madrilène entre dans la phase terminale de sa construction, la transition entre, elle aussi, dans le point culminant du processus. Comment apprendre à vivre sans Toni Kroos et Luka Modrić en devant composer avec leur omniprésence dans le vestiaire et sur le terrain ?
Transition, pression et succession
Si on vous posait la question ne serait-ce que l’année dernière en 2022, la négative aurait été évidente. Et elle est encore valable aujourd’hui à la veille du coup d’envoi de l’exercice 2023-2024, mais plus autant qu’avant.
La raison de cette nuance est toute simple, elle se situe derrière l’éclosion des Français Camavinga et Tchouaméni, ajoutée à l’installation express du crack Jude Bellingham. D’abord parce que le milieu anglais et l’ex-joueur du Stade Rennais ont été déclarés comme titulaires indiscutables pour la saison à venir, mais également parce que le numéro 8 et le numéro 10 du Real Madrid ont montré des signes de faiblesses face à l’intensité mise par les milieux adverses.
Cela a eu pour conséquence de faire reculer Toni Kroos un cran plus bas, lui qui s’accommode enfin au poste de numéro 6 seul devant la défense, longtemps après avoir boudé cette configuration et sans avoir apporté de garanties dans cette zone. Trop offensif, mais surtout plus intéressant un cran plus haut pour dicter le jeu de son équipe, le milieu allemand. Selon nous, l’ancien bavarois se positionne comme une sentinelle pour « échapper » au pressing adverse, plutôt que de chercher à équilibrer l’édifice madrilène et lui apporter la stabilité nécessaire.
En ce qui concerne Luka Modrić, le constat est quasiment le même. Comme son coéquipier allemand, il est encore capable de changer un match sur un geste et dicte le tempo des deux équipes sur la pelouse. Néanmoins, lui qui est très certainement le plus compétiteur du club espagnol, montre des signes de fatigue. Elle arrive plus vite à cause de son âge, et de facto, il ne peut plus jouer tous les matchs avec la même intensité qui est la sienne depuis ses années à Tottenham.
🚨 Communiqué Officiel : « Le Real Madrid C. F. et Luka Modrić se sont mis d’accord sur une prolongation de contrat pour le joueur, qui reste lié au club jusqu’au 30 juin 2024.
Luka Modrić a rejoint le Real Madrid en 2012. En onze saisons sous notre maillot, il a disputé 488… pic.twitter.com/zC4PhccocI
— Le Journal du Real (@lejournaldureal) June 26, 2023
Malgré tout cela, le passage en 4-4-2 losange rebat les cartes et relance le tandem légendaire dans la concurrence au milieu du terrain. Avec un milieu plus nombreux et donc plus dense, c’est possiblement moins d’efforts pour le magicien croate et le quarterback allemand. D’autant plus que le premier pourrait retrouver son poste d’origine (numéro 10) et le second évoluer à la place qui lui permet de compenser ses carences face à la pression adverse (numéro 6).
Toutefois, Toni Kroos aura du pain sur la planche : Aurélien Tchouaméni sort de la tournée de pré-saison américaine en ayant marqué de nombreux points. Sa simple présence sur le terrain au poste de sentinelle correspond systématiquement au moment où le Real Madrid est le plus stable sur le terrain et le plus cohérent dans la configuration du moment.
Luka Modrić est dans une situation similaire, puisque Jude Bellingham démontre l’étendue de son talent, et sa capacité à animer la pointe haute du losange. Il reste donc une place pour être le quatrième du quatuor au milieu. Au vu des problèmes défensifs rencontrés ainsi que des soucis dans l’animation offensive sur les côtés, Federico Valverde part avec une légère longueur d’avance pour occuper ce poste ingrat.
Enfin, en ce qui concerne l’approche dans le jeu, les qualités du duo germano-croates ne sont pas perdues. Elles subsistent grâce au talent des jeunes pousses, avec notamment Jude Bellingham qui semble être l’héritier naturel de Luka Modrić dans le profil, et le duo de Français du milieu dont le jeu long est en grande partie inspiré de leur aîné allemand. Chaque jeune milieu est aujourd’hui capable de répondre à n’importe quelle problématique tactique dans leur secteur de jeu, à défaut de pouvoir tirer ce constat en attaque et en défense.
Comment peut-on s’accorder la paix du vestiaire sans les faire jouer ?
La question n’est pas épineuse pour rien, puisque l’on parle ici de deux monstres sacrés de ce sport qui ont chacun un talent hors normes, une longévité folle au plus haut niveau, et maintenu un degré de compétitivité jusqu’à très récemment. La transition la plus compliquée à gérer est celle du milieu de terrain, non pas pour une question de profils ou de qualité de remplacement, mais bien parce que les anciens font de la résistance.
Véritables garants du vestiaire madrilène, doublé d’être 2 des 4 capitaines du club pour la saison 2023-2024, le duo de légendes a rarement peu joué, et accepte difficilement les rares temps morts nécessaires à leurs récupérations respectives en vue des matchs à forts enjeux. Avec le récent passage en 4-4-2 losange, les raisons pour voir Toni Kroos et Luka Modrić jouer régulièrement et avoir un rôle presque aussi important qu’avant existent comme exposé plus tôt dans cet article.
L’essentiel de cette question réside dans l’égo des deux joueurs, leur compréhension et leur acceptation de la situation. Évidemment, nous ne sommes pas dans l’intimité du vestiaire pour jauger parfaitement à quel point Toni Kroos et Luka Modrić sont prêts à passer leurs témoins.
Cependant, de notre perspective, nulle doute que la tâche de Carlo Ancelotti est certainement l’une des plus ardues qu’il ait eu à mener dans sa carrière. Très loyal envers ses amis, le transalpin aura bien du mal à devoir écarter petit à petit deux des éléments qui l’ont mené vers certaines de ses plus belles lignes de sa carrière de coach.
Mais c’est aussi parce que le technicien italien est le coach chargé de mener cette mission, lui qui est réputé pour être un manager et un gestionnaire d’égos hors pair, il n’est pas incongru de penser qu’il trouvera la solution face à ce casse-tête.