Les années de Benzema au Real Madrid, partie 1 : les débuts

Le 6 juin 2023, Benzema a fait ses adieux au Real Madrid et à toutes les personnes ayant de l'affection pour ce club, soit 14 ans après son arrivée en son sein.

Benzema

Une relation qui a duré bien plus longtemps que beaucoup l’auraient imaginé. Même si Benzema a décidé de mettre fin à ladite relation, son histoire d’amour entre lui et le Real Madrid n’est pas terminée, tant s’en faut. Elle perdurera après son départ comme elle avait débuté avant l’arrivée de l’attaquant français dans la capitale espagnole.

Le Real Madrid est le club de football qui accueille en son sein les meilleurs joueurs de la planète. Karim Benzema était supporter du club merengue dès son plus jeune âge. Le club madrilène et Benzema étaient donc destinés à faire cause commune. Cependant, même si le joueur de l’Olympique lyonnais était l’un des attaquants les plus talentueux de sa génération, il était loin d’imaginer qu’il marquerait autant l’histoire de son club de cœur.

Un talent précoce

Karim Benzema fait partie de cette génération talentueuse de joueurs français nés en 1987 et qui a remporté la Coupe du monde des moins de 17 ans lors l’année 2004 en compagnie de Samir Nasri, Hatem Ben Arfa et Jérémy Ménez. Son but incroyable marqué en Coupe Gambardella démontre tout le talent dont était doté Karim Benzema. Il ne s’en est d’ailleurs jamais caché : son club de cœur a toujours été le Real Madrid. Il a grandi avec la générations des Galactiques : Zidane, Ronaldo Nazario, Raul, Figo, etc. Le deuxième cité était sa référence et son exemple au poste d’attaquant.

Les excellentes performances de Benzema avec l’OL tant en Ligue 1 qu’en Ligue des champions ne sont pas passées inaperçues auprès des cadors européens. Même si le club de Jean-Michel Aulas était régulièrement l’auteur de parcours intéressants en Ligue des champions, il n’était pas en mesure de conserver ses meilleurs éléments face à la puissance et à l’aura des meilleurs clubs européens : Djila Diarra s’en était allé au Real Madrid, Mickael Essien et Florent Malouda à Chelsea et Eric Abidal au FC Barcelone.

Le Président Aulas – auquel Florentino Pérez a tenu à montrer sa reconnaissance lors de la conférence de départ de Benzema –, était parfaitement conscient qu’à terme, il lui serait très difficile de conserver sa jeune pépite. Sir Alex Ferguson n’avait pas caché son intérêt et Vicente Boluda, alors Président ad intérim du Real Madrid suite à la démission de Ramón Calderón, n’avait pas hésité à affirmer qu’il était déjà en contact avancés avec Cristiano Ronaldo et Karim Benzema. Txiki Beguiristain, alors Directeur technique du FC Barcelone, s’était rendu en France pour assister au quart de finale de Coupe de France entre l’OL et le FC Metz, rencontre lors de laquelle Benzema avait marqué.

Conscient que la concurrence serait rude pour ce jeune prodige, Florentino Pérez (alors fraichement élu Président du club), n’a pas lésiné sur les moyens pour attirer l’attaquant français dans son club. Afin de démontrer à Benzema et sa famille toute sa détermination et ses velléités de le voir porter le maillot de la Casa Blanca, Pérez s’est rendu en Jet privé jusqu’à Lyon. Depuis là, il est allé à Bron, au domicile des Benzema, chose qu’il n’avait jamais fait auparavant. Quelques années plus tard, Benzema reconnaîtra que ce geste avait eu une influence dans son choix de rejoindre le club madrilène.

Début difficiles avec Pellegrini

Karim Benzema est arrivé au Real Madrid avec le statut de jeune attaquant (21 ans) très talentueux et prometteur mais étant néanmoins déjà au bénéfice de prestations de référence en Ligue des champions avec l’Olympique lyonnais, notamment, son 8ème de finales contre le Manchester United de Sir Alex Ferguson. Auteur d’un but exceptionnel après un enchaînement de grande classe, Karim Benzema avait impressionné la planète football en parvenant à tromper la vigilance de la légendaire paire de centraux Vidic-Ferdinand.

Si Florentino Pérez avait décidé de faire un mercato historique en 2009, c’est parce que la finale de la Ligue des champions 2009-2010 se déroulait au Santiago Bernabéu et Pérez y voyait une occasion unique d’obtenir la Décima dans le stade du club. Dès lors, les attentes et l’expectative envers l’attaquant français étaient élevées dès son arrivée.

Le 1ᵉʳ juillet 2009, l’Olympique lyonnais avait annoncé qu’il avait trouvé un accord avec le Real Madrid pour le transfert de Karim Benzema pour une somme de 35 millions d’euros. Le jeune attaquant français signait au passage un contrat de six ans avec le club madrilène. Le 9 juillet 2009, Benzema a été présenté au Santiago Bernabéu.

Malgré une pré-saison réussie qui lui a permis de débuter les matchs officiels avec le statut de titulaire, Benzema a rapidement dû faire face à la farouche concurrence de Gonzalo Higuaín, présent au club depuis trois ans et bien déterminé à démontrer au nouveau Président qu’il comptait bien faire partie du nouveau projet. Malgré la confiance du technicien chilien, El Pipita était préféré au jeune Karim lors des échéances à enjeu et Pellegrini avait tenu à faire savoir que Benzema comme Garay avaient le niveau des titulaires mais qu’il devait faire des choix et que les équipes ne se faisaient pas uniquement avec 11 joueurs.

Ne maîtrisant pas la langue de Cervantes et ne pouvant compter que sur son compatriote Lass pour communiquer au sein du vestiaire madrilène, le jeune Français a eu une adaptation délicate. Loin de sa famille pour la première fois de sa vie, Benzema a pu compter sur les soutiens de Zinédine Zidane et de Florentino Pérez à cette époque. Malgré une saison en Liga bouclée avec 96 points, les éliminations en 8es de finales contre son ancien club lyonnais et le club de 3ème division Alcorcón en Coupe du Roi auront eu raison de la continuité de Manuel Pellegrini sur le banc madrilène.

Progression avec Mourinho

C’est avec un José Mourinho tout auréolé de son historique triplé avec l’Inter que Benzema avait commencé sa 2ème saison dans la capitale espagnole. Loin de remettre en question les qualités et le talent du jeune Français, Mourinho a rapidement tenu à mettre en exergue que ces derniers n’étaient pas suffisants dans un club de l’envergure du Real Madrid et qu’il était en droit d’attendre beaucoup plus de son attaquant. Comme son prédécesseur, l’entraîneur portugais lui a rapidement préféré Higuaín à la pointe de l’attaque.

Cependant, à la suite de une blessure de l’Argentin en novembre, Benzema a bénéficié de continuité comme titulaire et en a profité pour inscrire plusieurs buts, dont un d’anthologie à Séville en Coupe du Roi (qu’il ira célébrer vers Mourinho). En dépit du capital confiance engrangé et de ses performances honorables, elles n’ont pas été suffisantes pour que Mourinho renonce à demander le recrutement d’un attaquant supplémentaire durant la trêve de janvier. Le double vainqueur de la Ligue des champions avec le FC Porto et l’Inter n’avait pas hésité à aller au clash avec Jorge Valdano, directeur sportif d’alors, obtenant son éviction du club au passage.

En manque de temps de jeu à Manchester City, Emmanuel Adebayor a été prêté au Real Madrid pour une durée de six mois et l’attaquant togolais a immédiatement subjugué le madridismo. À tel point que lors du match aller de 8e de finale face à l’OL à Gerland, Mourinho n’a pas hésité à l’heure de titulariser l’avant-centre des Eperviers alors que Karim rêvait de briller devant sa famille et ses proches venus expressément pour le soutenir.

Piqué dans son orgueil, le jeune attaquant a tenu à démontrer à son coach d’alors qu’il avait été l’auteur d’une erreur de casting pour cette rencontre. Alors qu’il avait remplacé Adebayor à la 64e minute, il n’a fallu qu’une minute à Benzema pour inscrire le but l’égalisation et envoyer un message fort à son coach. Fait marquant de cette action, Florentino Pérez s’est levé de son siège pour célébrer le but de son poulain, chose qu’il ne reproduira uniquement qu’après la 28e seconde de la 93e minute de la finale de Ligue des champions à Lisbonne en mai 2014.

Malgré des performances intéressantes lors de ses apparitions durant la seconde partie de saison, Benzema n’a pas pris part aux matchs cruciaux face au FC Barcelone de Pep Guardiola, tant en Ligue des champions qu’en finale de Coupe du Roi. Toutefois, sa résilience a été saluée par José Mourinho.

Lors de ce printemps 2012, Benzema a inscrit l’un de ses plus beaux buts de sa carrière à Pampelune face à Osasuna. Suite à un débordement et un centre de Cristiano Ronaldo depuis l’aile gauche (et du pied gauche), Karim Benzema a repris de volée le centre de son compère de l’attaque avec suffisamment de puissance pour que le ballon termine sa course dans la lucarne.

Ce geste de grande classe démontre réellement que Karim se trouvait dans une bonne dynamique à cet instant. Nombreux sont ceux qui ont immédiatement souligné la similarité entre ce but et celui inscrit par Marco Van Basten à l’Olympiastadium de Münich, en finale de l’Euro 88 face à l’URSS. Ce jour-là, l’emblématique avant-centre de l’AC Milan et des Pays-Bas avait également repris de volée un centre venu du côté gauche et sa frappe avait également terminé sa course dans le petit filet opposé. Comparaison certes flatteuse pour le jeune Karim mais cela démontrait également qu’il avait déjà grandement progressé depuis son arrivée dans la capitale espagnole et qu’il était franchement sur la pente ascendante.

Dès lors, son entraîneur n’a pas hésité à lui accorder plus de protagonisme durant la saison suivante, celle de la Liga des records. Benzema n’était plus celui de ses débuts. Beaucoup moins timoré, inhibé et démontrant bien plus d’assurances dans sa gestuelle, Benzema s’est imposé comme une pièce importante de l’attaque madridiste.

Lors de la saison 2012-2013, bien que le Real Madrid n’ait pas gagné de titre, Benzema a poursuivi sa progression et a eu l’occasion de développer une qualité qui ne lui sera reconnue que bien des années plus tard : l’altruisme. En faisant son apparition sur le podium des meilleurs passeurs de LaLiga avec 12 assists, derrière Andrés Iniesta (16) et son coéquipier Mesut Ozil (15), le natif de Bron a démontré qu’il n’était pas qu’un finisseur. Outre le fait de recevoir la dernière passe, il était également à même de la délivrer lui-même. Les années d’après, Carlo Ancelotti et Zinédine Zidane n’ont pas manqué de tirer profit de cette facette de la palette de Benzema.

 

Gjon Haskaj