Vainqueur de la Ligue Europa 2020, rival redoutable et crédible du Real Madrid dans la course au titre durant une grande partie la saison dernière, le Séville FC a perdu de sa superbe, et c’est un euphémisme. Comme mentionné auparavant, après 10 journées de championnat, le club andalou végète à une 12e place indigne d’un club de son statut et de son aura. En Ligue des champions, ses chances de qualification pour les huitièmes de finales paraissent d’ores et déjà scellées alors que lors du tirage au sort, la deuxième place qualificative paraissait largement accessible aux pensionnaires du Sánchez Pizjuán.
Mais, une large défaite à domicile face au Borussia Dortmund (1-4), concurrent direct pour la qualification, a vraisemblablement signé la fin des espoirs Sévillans de continuer l’aventure en Ligue des champions comme elle a été rédhibitoire pour Julen Lopetegui. En effet, le coach espagnol, au bénéfice d’un bilan remarquable à la tête du Séville FC, a été remercié à la suite de cette défaite, non sans avoir reçu une ovation du public du Sánchez Pizjuán, preuve que son travail en terre andalouse était apprécié et valorisé.
Une planification sportive désastreuse
Dès lors, se pose la question de savoir ce qui a pu se produire pour que ce club à qui tout semblait réussir il y a peu, subisse une descente aux enfers aussi subite que brutale. Selon nous, les départs conjugués de Diego Carlos et Jules Koundé ont eu un impact bien plus important que ce qui était prévu.
Le duo franco-brésilien constituait l’une des charnières centrales les plus redoutables d’Espagne voir d’Europe et n’était pas étrangère aux succès Sévillans de ces dernières saisons. Et ceci, à tel point d’attirer l’attention des principales écuries européennes. Malgré les rumeurs de départ insistantes à chaque mercato, Monchi, le directeur sportif sévillan, s’en remettait inlassablement aux clauses de résiliation des contrats des deux joueurs. Elles paraissaient suffisamment dissuasives pour que le club andalou puisse préserver sa charnière centrale durant quelques années encore.
Et, puis le 26 mai dernier, Aston Villa annonçait avoir trouvé un accord avec le Séville FC pour le transfert de Diego Carlos. Même si le montant n’a pas été dévoilé par les deux clubs, la somme de 31 millions d’euros a été évoquée, ce qui semble relativement dérisoire compte-tenu du prix moyen actuel pour un joueur de ce calibre. Au-delà de son caractère surprenant, ce transfert marque un changement de paradigme : un club de seconde zone de Premier League est désormais à même d’attirer les meilleurs joueurs de LaLiga grâce à sa puissance financière, ce qui laisse songeur pour le rayonnement des clubs espagnols durant cette décennie sur la scène européenne.
Après Diego Carlos, au tour de Koundé de plier bagages
Toujours est-il que les velléités des autres clubs n’allaient pas s’arrêter en si bon chemin, bien au contraire. Conscients que le Séville FC avait montré des signes de faiblesse avec le transfert de Diego Carlos, les grandes écuries européennes y ont vu une opportunité aussi inattendue qu’à ne pas laisser passer afin d’attirer Jules Koundé dans leurs rangs, l’autre point lourd de l’effectif sévillan.
L’international français, longtemps annoncé du côté de Chelsea, a finalement rejoint le FC Barcelone, pour la modique somme de 50 millions d’euros, ce qui constitue la deuxième manœuvre étonnante de l’été pour le Séville FC. Au-delà de la somme dérisoire du transfert en comparaison avec les chiffres évoqués pour un potentiel transfert au Real Madrid, le fait de renforcer celui qui était un concurrent direct ces dernières saisons constitue une erreur de gestion gravissime.
Les déclarations ultérieures de Monchi, qui a tenté de justifier ce mouvement en arguant que le FC Barcelone n’était pas un concurrent direct, le Séville FC luttant dans une catégorie inférieure, démontre le peu d’ambition du sulfureux, mais néanmoins talentueux directeur sportif espagnol, autant que son aplaventrisme devant le club catalan. C’est bien là où le bât blesse : durant les 20 dernières années, le FC Barcelone s’est fait une joie de faire ses achats majoritairement au sein de LaLiga, affaiblissant tant ses potentiels adversaires que le niveau général du championnat.
Rien qu’en s’attardant sur le Séville FC, l’on peut citer Dani Alves, Rakitić, Adriano, Aleix Vidal ou encore Luuk de Jong comme joueurs qui sont passés du club andalou au club catalan et ceci, sans citer ceux qui ont fait le chemin inverse, soit par prêt ou par vente. Cet état de fait est tellement prononcé que certaines mauvaises langues n’ont pas hésité à qualifier le FC Séville de réserve ou de laboratoire du FC Barcelone.
Intransigeance sévillane envers le Real Madrid
Ceci contraste avec la relation qu’entretien le Séville FC avec le Real Madrid. Le transfert de Sergio Ramos, événement marquant de la fin du premier mandat de Pérez avait été effectué au prix d’une somme astronomique pour l’époque pour un défenseur de 19 ans (27 millions d’euros) mais avait également valu d’inlassables remontrances de la part des supporters du Sánchez Pizjuán à l’actuel défenseur du PSG, à chaque fois que le Real Madrid affrontait le Séville FC en terres andalouses.
Ce sentiment d’infériorité implicite qu’entretient le Séville FC avec le FC Barcelone porte son lot de conséquences et elles sont extrêmement lourdes pour le club andalou. Un club de son rang, qui a toujours eu comme réputation d’effectuer des recrutements considérés comme intelligents et avisés ne peut pas se permettre de perdre deux éléments majeurs de son effectif à des postes aussi importants dans une équipe. À titre exemplatif, le Real Madrid a comblé le départ de Sergio Ramos par l’arrivée d’Alaba et avait déjà anticipé la relève de sa légendaire charnière avec l’arrivée de Militão, il y a quelques saisons. Dès lors, le choc brutal de la fin de l’ère de la charnière Varane-Ramos a été rapidement amorti.
Des départs de poids qui n’ont pas été comblés
En outre, le départ de Lucas Ocampos en prêt en direction de l’Ajax Amsterdam constitue également une perte à ne pas négliger. Bien qu’irrégulier, il était, selon nous, le principal atout offensif d’un Séville FC qui aura atteint des sommets ces dernières saisons. Durant son passage au sein du club au maillot rouge et blanc, l’ailier argentin avait atteint un excellent niveau et acquis un degré de confiance conséquent, à tel point que les rumeurs l’envoyaient vers les clubs les plus prestigieux d’Europe.
Pour compenser ces départs, les transferts, prêts ou retours de prêt de Luuk de Jong, Telles, Dolberg, Januzaj, Marcão, Isco ou Nianzou, pour ne citer qu’eux, sont clairement insuffisants pour pallier le manquement que constitue la perte d’éléments aussi importants. À la décharge de Monchi, le marché des transferts actuel est passablement déréglé depuis l’avènement sur la scène footballistique des clubs-états que sont Manchester City et le PSG. Ajouté au fait que la Liga ne bénéficie plus de la même aura depuis les départs de Ronaldo et Messi, les clubs espagnols ne peuvent plus se pavaner avec le même train sénatorial qui était le leur lors de la dernière décennie.
L’histoire se répète pour Lopetegui
Néanmoins, nous considérons que Monchi, avec les moyens à sa disposition, avait largement la possibilité de faire mieux. Le Séville FC est donc victime en ce début de saison d’une planification sportive insuffisante et Julen Lopetegui, de manière sévère, en paie une fois encore les pots cassés, comme cela avait été le cas lors de son bref passage au Real Madrid lors de la saison 2018-2019, lors de laquelle les merengues avaient effectué une saison blanche suite au départ, entre autres, de Ronaldo, qui n’avait pas été immédiatement comblé.
L’arrivée de Jorge Sampaoli pour le remplacer a eu un effet plutôt positif jusqu’à présent avec aucune défaite à l’actif du coach argentin, ce qui a permis à l’effectif d’inverser la spirale négative dans laquelle il était embourbé. Toutefois, les erreurs commises par la direction sportive ayant été aussi nombreuses que graves durant la pré-saison, il nous paraît extrêmement compliqué que le Séville FC revienne au rang qui était le sien il y a peu de manière immédiate. Il faudra pour cela qu’il revienne à ce qui a toujours fait sa force : la détection de talents à prix réduits et une politique très agressive et intransigeante en matière de vente de joueurs.
Cependant, comme relevé auparavant, l’attitude hostile que les pensionnaires de Sánchez Pizjuán entretiennent à l’égard du Real Madrid garanti qu’ils sauront se transcender ce soir au Bernabéu, à tout le moins, ils ne feront aucun cadeau à leur adversaire du jour, les hommes d’Ancelotti ont donc tout intérêt à ne pas prendre cette rencontre à la légère et de respecter leur adversaire du soir afin de faire perdurer l’excellent moment qu’ils sont en train de traverser et de consolider leur place de leader. Rendez-vous ce soir à 21h.