Real Madrid – Manchester City : le combat des géants, saison 3

Pour la troisième fois consécutive, les Merengues se frottent à l’ogre mancunien en phase finale de Ligue des champions. Si le rapport de force psychologique est forcément en faveur des hommes de Pep Guardiola, les Madrilènes comptent bien d’autres armes pour bousculer le tenant du titre. Et laver l’affront provoqué par la gifle de l’an passé.

L’ouragan guette Madrid. À l’aube d’un tel affrontement, les esprits se préparent à une collision stellaire. Sur les deux dernières éditions, l’opposition entre le Real Madrid et Manchester City a accouché d’un objet footballistique surnaturel, celui dont on a toutes les peines du monde à en expliquer les ressorts, décrypter les causes, analyser les conséquences. Que cela soit la demi-finale retour en 2022 (3-1) à Madrid ou celle de l’an dernier (4-0) outre-Manche, le tourbillon d’éléments extraordinaires a complexifié la dissection rationnelle post-rencontre.

Alors, nouvelle surprise divine ou autre destruction méthodique ? Le choc de ce mardi devrait en tout cas livrer une intensité similaire et s’inscrire dans la continuité de ces matchs à la saveur unique. Mais au moment de croiser à nouveau le fer avec Pep Guardiola, Carlo Ancelotti a de quoi trembler.

S’il se remémore le passé immédiat, le vertige de la claque reçue en 2023 à l’Etihad Stadium pourrait instiller le doute dans la tête du manager italien. Son humilité couplée à sa légendaire placidité devrait toutefois éloigner toute appréhension dans sa préparation. Surtout que, cette année, le contexte diffère. Manchester City, sur la troisième marche du podium en Premier League, représente moins la machine à éparpiller ses adversaires cette saison. Le Real Madrid dispose dorénavant d’une pièce maîtresse en la personne de Bellingham. La conjugaison de ces deux nouveaux facteurs produit une réelle incertitude quant à l’issue de cette double confrontation.

Les statistiquess sont en faveur du Real Madrid, Manchester City n’a gagné que 4 fois en 15 déplacements en péninsule ibérique. – Photo by Icon Sport

Des duels à la pelle

Lors des grands rendez-vous européens, il est de coutume d’évoquer les traditionnels ‘matchs dans le match’. Plus que jamais, ce 9 avril, chaque ligne du terrain s’affrontera à distance afin d’asseoir son autorité ou de contenir la menace adverse. Antonio Rüdiger face à Rúben Dias, Kévin De Bruyne contre Jude Bellingham, Vinícius Júnior ou Jack GrealishDu talent à tous les étages, de l’expérience dispersée à chaque niveau, deux entraîneurs au tempérament opposé : ce Real Madrid-City constitue bien l’affiche la plus séduisante du Vieux Continent.

Des étoiles au service du jeu. Si le Santiago Bernabéu verra une pluie de stars s’abattre sur sa pelouse pendant 90 minutes, il n’en sera pas moins émerveillé par la justesse technique des principaux acteurs. La possession, marque de fabrique de Guardiola, devrait être l’apanage de City. La clé résidera donc dans l’utilisation des périodes sans ballon côté Real Madrid, et sur la manière dont l’équipe articulera son pressing. De la qualité des mouvements groupés du Real Madrid dépendra l’efficacité de sa stratégie.

« La saison dernière, nous avons cruellement manqué de courage et de personnalité », a concédé Carlo Ancelotti en conférence de presse ce lundi. Du cœur, il faudra en mettre dans chaque impact lors de ce quart de finale aller. Même si Manchester City se présente avec quelques absences de marque en défense.

Une défense cityzen expérimentale

Kyle Walker et Nathan Ake n’ont pas effectué le déplacement avec le reste de leurs coéquipiers. La blessure de l’Anglais, contractée lors d’un match amical avec sa sélection, est une sacrée épine dans le pied de Guardiola, qui comptait sur lui pour stopper les folles enjambées de Vini.

Confronté à une pénurie de latéraux, le coach catalan devrait faire confiance à Rico Lewis, défenseur droit de 19 ans qui a disputé les trois derniers matches de championnat. De l’autre côté, l’option Manuel Akanji tient la corde en raison de la possible inaptitude de Josko Gvardiol, pourtant convoqué dans le groupe. Ces nouveautés dans l’animation de l’arrière-garde mancunienne pourraient provoquer des fissures dans la machine, habituellement en pilotage automatique.

En face, le mystère demeure sur l’identité de celui qui accompagnera Antonio Rüdiger en charnière centrale. Tchouaméni ou Nacho ? La première possibilité a le mérite d’assurer la présence sur le pré d’Eduardo Camavinga, dont la créativité pourrait ouvrir bien des espaces à ses partenaires. La seconde ferait la part belle à un défenseur de métier, dont le qualificatif de « soldat » revient souvent lorsqu’on évoque son cas auprès des supporters de la Maison Blanche. À l’heure où nous écrivons ces lignes, certaines sources évoquent une titularisation du Français, sans être catégoriques.

« 90 minutes ici sont très longues »

Autre paramètre de taille ce mardi soir : les sanctions de l’arbitre François Letexier. Vinicius, Bellingham, Camavinga et Tchouaméni risquent une suspension pour le quart de finale retour en cas de carton jaune, quand seul Rúben Dias est dans la même situation pour le club anglais. Un mauvais geste et c’est un chapelet de certitudes qui s’envolerait pour le Real Madrid, avec l’architecture de l’entre jeu et de l’attaque à revoir. « Nous ne sommes pas inquiets par rapport à cela », a tranché Carlo Ancelotti. Un moyen de décharger ses joueurs de cette épée de Damoclès qui aurait pu les amener à aborder la rencontre avec le frein à main.

Pour sa part, Pep Guardiola préfère mettre en avant l’ADN du club receveur. « Battre le Real Madrid deux fois de suite n’est pas facile. Ils ont appris et voudront se venger. Ils ont une fierté. » Avant d’ajouter, en clin d’œil à la légendaire demi-finale d’il y a deux ans : « 90 minutes ici sont très longues… » Ce soir-là, le toit du Bernabéu n’existait pas encore. Devant l’atmosphère incandescente provoquée par le doublé de Rodrygo, il se serait probablement effondré. Ce mardi 9 avril 2024, le couvercle devrait recouvrir un stade tout de blanc vêtu, qui ne demande qu’à ressentir encore l’ivresse des grands soirs.

Tanguy Soyer