Quels enjeux tactiques face à Manchester City ?

Le Real Madrid entame une semaine décisive pour le dénouement de sa saison. Ce mercredi, sa confrontation à Manchester contre City déterminera sa continuité ou non dans sa compétition fétiche. Face aux Cityzens, comme l’a démontré le match aller, l’approche tactique pourrait s’avérer déterminante.

Nous le savons, et ils le savent : le Real Madrid jouera mercredi soir le match le plus important de leur saison. Excuses et erreurs seront les mots interdits à l’Etihad Stadium. Mardi passé, Ancelotti avait surpris Guardiola en alternant les positions de Viní Jr. et Rodrygo. Bien plus, son approche de la rencontre avait passablement gêné les Cityzens. À tel point qu’avec un peu plus d’adresse, les hommes d’Ancelotti auraient pu rentrer aux vestiaires avec deux longueurs d’avance. Qu’en sera-t-il pour la rencontre décisive de ce mercredi ?

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Une composition d’équipe presque similaire

Pour le choc à l’Etihad, le même 11 qu’à l’aller devrait être aligné, à l’exception de Tchouaméni. Le Français étant suspendu, c’est vraisemblablement Nacho qui devrait le suppléer. La principale interrogation quant à la composition réside dans les positionnements de Viní Jr. et Rodrygo. Même s’il a été l’auteur d’un match honorable avec deux passes décisives à la clé, Viní Jr. n’a pas paru complètement à son aise dans le rôle de faux 9 et paraissait souvent désorienté dans les courses qu’il devait effectuer.

Même si cette commutation de poste s’est avérée bénéfique pour Rodrygo, se pose la question de savoir si elle l’a été pour l’équipe dans sa globalité. En effet, outre, ses qualités de percussion, l’abattage défensif de Viní Jr. sur le côté gauche est largement sous-estimé. En attestent les rencontres en finale de SuperCoupe d’Espagne face à Barcelone et en Liga face à Gérone. Carlo Ancelotti devra donc effectuer une pondération entre les apports de Viní Jr. et Rodrygo aux deux postes de l’attaque afin de déterminer quelle configuration apportera le plus à l’équipe.

Dans tous les cas, il devra faire en sorte que Bellingham soit mis dans de meilleures dispositions qu’à l’aller. L’Anglais, bien qu’à mettre au crédit d’un gros travail défensif, a été l’auteur de sa plus mauvaise performance sous la tunique madrilène. Agressé par les milieux cityzens dès que le cuir lui parvenait, Bellingham n’a pas trouvé la parade pour participer plus activement au jeu de son équipe. Nous sommes d’avis qu’il gagnerait à partir de plus bas sur le terrain afin qu’il puisse se projeter plus aisément en phase offensive.

Une assise défensive à maintenir avec des ajustements à effectuer

Outre le réalisme devant les cages adverses, l’assise défensive sera l’une des clés du dénouement de la rencontre de mercredi. Au coup de sifflet initial, le Real Madrid n’est pas éliminé et maintenir sa cage inviolée l’emmènerait au minimum aux prolongations. Les trois réalisations de Manchester City sont passablement trompeuses quant à la réelle solidité défensive du Real Madrid sur le match aller.

City n’est tout simplement pas parvenu à obtenir des occasions nettes dans la surface madrilène. Leurs trois buts proviennent d’une grossière erreur de Lunin et de deux frappes splendides hors de la surface de réparation. À aucun moment la défense du Real Madrid n’a été mise hors de position.

Toutefois, sur la 2ᵉ et la 3ᵉ réalisation, Kroos et Valverde, avec l’intention d’apporter du soutien à leur latéral, ont été happés par l’action sur leur côté. Dans de telles configurations, leur priorité doit se situer dans le fait de couper la ligne de passe vers l’axe. C’est un point qui devra impérativement être corrigé au match retour.

Le côté droit doit être mieux exploité et Ancelotti plus prompt dans ses changements

L’un des points négatifs de la rencontre de mardi passé réside dans le manque de projection de Valverde et Carvajal sur le côté droit. Gvardiol a passé une soirée trop tranquille alors qu’il a pris l’habitude d’être le maillon faible de la ligne défensive cityzen cette saison. Le talentueux défenseur croate paraît souvent emprunté à un poste qui n’est pas le sien. Il conviendra de mieux exploiter ce talon d’Achille mercredi. Rodrygo, s’il est repositionné dans l’axe, pourrait s’excentrer sur le côté droit afin de poser des problèmes au Croate.

Pour sa part, Ancelotti devra être bien plus réactif qu’à l’aller s’il entend obtenir un résultat positif à l’Etihad. Guardiola est un entraîneur qui a pour habitude d’effectuer des changements positionnels et tactiques à la mi-temps et durant les mi-temps. Même si l’Italien a surpris son homologue espagnol lors de la première période du match aller, il s’est montré beaucoup trop lent à réagir à la baisse drastique d’énergie de Kroos, Bellingham et Viní Jr. ainsi qu’au repositionnement de Stones.

Enjeux offensifs capitaux

Le football est un sport collectif réunissant un tas d’énormes individualités, et ces dernières seront particulièrement attendues au tournant. Le numéro 7 est évidemment en tête de gondole ; pourtant, auteur de deux passes décisives, il n’était pas au paroxysme de son aisance et de son talent lors du premier round.

Peu importe la tactique que Carlo Ancelotti mettra en place, les grands moments appartiennent aux grands joueurs et Vinicius Jr. n’a jamais dérogé à cette règle. Depuis la saison 2021/2022, il est le meilleur joueur de la Ligue des Champions : 14 buts, 15 passes décisives, 98 dribbles réussis et 197 duels gagnés. Le Brésilien n’en a cure des Haaland, De Bruyne, Messi ou Mbappé ; il est là uniquement pour écrire son histoire et celle du Real Madrid.

Le patron de l’attaque depuis maintenant plus d’un an devra probablement affronter son plus grand défi : Kyle Walker. Pep Guardiola, optimiste quant à son retour pour mercredi, ne pourra pas se passer de son latéral droit qui a tant manqué à la défense cityzen au match aller, comme en témoigne le deuxième but de Rodrygo. À l’image de la demi-finale aller au Santiago Bernabéu la saison dernière, Vinicius Jr. devra se montrer décisif malgré le défi imposé par Walker. Un échantillon en a déjà été aperçu lors de la trêve internationale et du match Angleterre – Brésil, rencontre où le latéral anglais s’était blessé face à son futur vis-à-vis brésilien.

Cependant, il est facile de pointer l’entière responsabilité sur l’ancien numéro 20 madrilène. D’autres joueurs offensifs seront aussi responsabilisés : Rodrygo Goes et Jude Bellingham. Rodrygo, placé à son poste de prédilection, à gauche, le 8 avril dernier, au sein duquel il avait brillé et bouleversé la défense des Skyblues, jouera aussi gros. Ayant mûri depuis son doublé historique lors de la demi-finale retour face à City en 21/22, il est légitime d’en attendre beaucoup de Rodrygo, quel que soit son placement.

Après un but important mardi dernier, il est temps de réitérer pour l’ancien joueur de Santos. À droite, en déstabilisant Gvardiol, en pointe ou à gauche, le numéro 11 madrilène devra tenir son rôle d’attaquant/ailier et semer la zizanie à l’Etihad Stadium. L’homme du Real Madrid cette saison, qui n’est autre que l’Anglais Jude Bellingham, est celui qui a le plus à prouver pour ce quart de finale retour. Auteur d’une performance moyenne au Bernabéu, malgré un apport défensif non négligeable, éclipsé toutefois par la capacité de musèlement de l’entre-jeu cityzen, Bellingham a une revanche à prendre.

Le joueur des grands rendez-vous a manqué à l’appel une fois, mais pas deux. Certes, Vinicius Jr. doit être celui qui endosse ce rôle, surtout depuis son retour à la compétition, mais Bellingham a prouvé qu’il était capable de porter ce Real Madrid offensivement et de les sortir de n’importe quel bourbier. À lui de nous faire oublier ce match aller et de briller devant son public national.

Gare à la ligne défensive

Malgré les bonnes performances défensives de Mendy, Rüdiger et Carvajal à l’aller, il faut rester prudent. Comme mentionné en préambule, Nacho sera probablement le titulaire aux côtés de Rüdiger, palliant la suspension d’Aurélien Tchouaméni. Ce dernier, ayant repris du rythme récemment lors du match face à Majorque, sera attendu au tournant. Les grands rendez-vous, Nacho les connaît, le problème n’est pas là. L’alarme se concentre davantage sur son niveau régulier affiché sur l’ensemble de la saison, qui ne rassure pas forcément.

Sur la ligne défensive, rien d’autre à signaler, mais si nous nous penchons légèrement plus haut sur le terrain, des interrogations émergent. Qui sera devant la défense ou quels joueurs constitueront le double pivot, si cette tactique est privilégiée ? Eduardo Camavinga, bien que solide dans les duels et très entreprenant offensivement (comme en témoigne son but), laisse beaucoup de spécialistes dubitatifs quant à ses lacunes en termes de placement défensif.

Toni Kroos, aussi classe, métronome et élégant soit-il, a montré, par le passé, face à un énorme pressing, qu’il pouvait être handicapé voire invisible. Valverde, joueur impossible à écarter du XI titulaire, sera forcément le joueur utilisé en 6 si un double pivot est aligné. Reste à voir qui sera son compagnon.

Entre réalisme, besoin de laver l’affront et doutes défensifs, le Real Madrid attaque son quart de finale retour avec des incertitudes mais surtout avec un collectif soudé, des individualités fiables et une envie incommensurable de réaliser l’impossible : gagner à l’Etihad Stadium.

 

Gjon Haskaj & Walid Soltani